Tout avait bien commencé avec une ovation de gala pour Fandiño lors du paseo, témoignant de la côte d'amour du torero de Orduña, basque parmi les basques et enfant chéri d'une aficion largement représentée sur les gradins. Pour rester dans la note bascophile, le soliste se vit offrir par le maire de Bayonne un makila d'honneur et un jeune danseur l'accueillit d'un aurresku bien tempéré. Ce fut, à y repenser, le plus beau moment de l'après-midi: le matador, jambes écartées et campé tel un mâle guerrier couillu regardant face à lui ce danseur léger, par moment féminin, le gratifier d'une rituelle chorégraphie de bienvenue, alerte et gracieuse. Et pendant quelques instants, Fandiño fut le toro massif qui regarde et le danseur, le virevoltant torero qui décrit sur le sable de savantes et mystérieuses arabesques.
Beau début sous les caméras de direct de Canal+ assurant la promotion de la ville, du Pays basque et de l'aficion française, assaisonnée d'une réponse basco-basque, à peine voilée, à la proche municipalité bilduienne de San-Sebastian/Donosti, qui, dans un cocktail bien connu d'animalisme et de nationalisme, vient d'interdire les corridas sur son territoire.
Ricardo Gallardo, l'éleveur, ouvrait sa grande gueule et son carnet de notes et le duo Moles/Muñoz faisait merveille au micro de la chaîne taurine espagnole.
Pour avoir regardé, le soir même, la retransmission en différé -histoire de vérifier si les gros plans révélaient ce qui nous aurait échappé in vivo - reconnaissons qu'elle fut réussie, à une légère glissade près. Manolo Moles, lors d'un reportage sur la ville, confondit la Mairie de Bayonne avec le casino local... Il est vrai qu'en ces temps électoraux on y joue gros jeu. En tout cas, preuve est faite que Moles n'est pas joueur.
Tout avait donc débuté sous les meilleurs auspices.
Deux heures et demi plus tard, nous déchantions devant les ruines de ce bel édifice médiatico-taurin.
Désastre ganadero. Six toros nullissimes - à des nuances prés que je renonce à faire vu l'extrême médiocrité de l'ensemble - manquant de race, de bravoure, d'allant, de caste, de mobilité, de noblesse... de tout ce qui fait un toro de combat et que l'on trouve habituellement, plutôt plus que moins, dans l'élevage de Fuente Ymbro.
Comment en arriver à ce naufrage, à cette insipidité sans rapport avec ce que l'élevage offre régulièrement? Comment se tromper à ce point, lors d'un évènement aussi attendu?
À l'issue de la course, durant la tertulia organisée par deux jeunes aficionadas, au Trinquet Moderne, à deux pas des arènes, (elle se tiendra régulièrement lors des courses bayonnaises à venir), le mayoral, Alfonso Vasquez, reconnaissait le fiasco, sans pouvoir (publiquement?) l'expliquer autrement que par la métaphore maraîchère et éculée des melons. Ouais.
Une corrida peut sortir mauvaise. Mais dénaturée à ce point, cela pose question.
Surproduction (20 corridas et 12 novilladas vendues cette saison)? Tentative ratée de fournir, pour l'occasion, du "sur-mesure" au copain Fandiño? Écoulement à cette occasion de quelques "rossignols" (ce serait trop laid et stupide)?
Les hommes maintenant.
Il y avait un prix à la meilleure pique, offert par les peñas taurines de la ville. Le comble de la parodie fut de trouver un triomphateur, dont je tairai le nom par pudeur. Il fut proclamé sous les sifflets et du coup, ce nouveau prix se discrédita aussitôt né. En fait de piques, nous eûmes des simulacres, des piques vrillées et mal placées, des mise en suerte bâclées par le maestro lui-même, sans arrêter le toro face au picador. Rien que de très banal et insignifiant. ¡Vaya premio!
Fandiño, pour finir. On sait ses qualités d'engagement, de courage. Les cornes passent tout prés et il ne rompt pas. Il n'a pas failli à cette réputation.
Mais, en fait, il m'a déçu. Fandiño est un torero corto, de peu de répertoire, ce qui n'est pas un avantage pour un "un contre six". Il pourrait s'en tirer malgré tout si ce toreo basique atteignait une profondeur exceptionnelle; ce qui n'est pas le cas.
En fait, on s'est un peu ennuyé et pas par la seule faute des toros.
Par ailleurs, ces manières de lidiador en acier trempé manquent à mon goût singulièrement de souplesse, de finesse, d'une certaine fragilité - oserais-je dire d'une féminité - carence qui l'empêche de pousser le contre-ut. Fandiño m'est apparu comme le torero d'une couleur.
Enfin, ses faenas ont manqué d'enchaînement, comme s'il voulait absolument imposer sa volonté en rompant le (petit!) allant de ses opposants.
Autrement dit, et pour conclure, ce que Fandiño a montré à Bayonne ce samedi 10 août, ce sont ses limites. Il lui faudra acquérir souplesse, inventivité et profondeur s'il veut prétendre au premier rang. En est-il capable? La réponse dans deux ou trois saisons.
En attendant, son entourage serait bien avisé de le faire renoncer à ces défis solitaires qu'il n'est pas encore en mesure d'honorer vraiment.
Il y avait un prix à la meilleure pique, offert par les peñas taurines de la ville. Le comble de la parodie fut de trouver un triomphateur, dont je tairai le nom par pudeur. Il fut proclamé sous les sifflets et du coup, ce nouveau prix se discrédita aussitôt né. En fait de piques, nous eûmes des simulacres, des piques vrillées et mal placées, des mise en suerte bâclées par le maestro lui-même, sans arrêter le toro face au picador. Rien que de très banal et insignifiant. ¡Vaya premio!
Fandiño, pour finir. On sait ses qualités d'engagement, de courage. Les cornes passent tout prés et il ne rompt pas. Il n'a pas failli à cette réputation.
Mais, en fait, il m'a déçu. Fandiño est un torero corto, de peu de répertoire, ce qui n'est pas un avantage pour un "un contre six". Il pourrait s'en tirer malgré tout si ce toreo basique atteignait une profondeur exceptionnelle; ce qui n'est pas le cas.
En fait, on s'est un peu ennuyé et pas par la seule faute des toros.
Par ailleurs, ces manières de lidiador en acier trempé manquent à mon goût singulièrement de souplesse, de finesse, d'une certaine fragilité - oserais-je dire d'une féminité - carence qui l'empêche de pousser le contre-ut. Fandiño m'est apparu comme le torero d'une couleur.
Autrement dit, et pour conclure, ce que Fandiño a montré à Bayonne ce samedi 10 août, ce sont ses limites. Il lui faudra acquérir souplesse, inventivité et profondeur s'il veut prétendre au premier rang. En est-il capable? La réponse dans deux ou trois saisons.
En attendant, son entourage serait bien avisé de le faire renoncer à ces défis solitaires qu'il n'est pas encore en mesure d'honorer vraiment.