Ce qui me plait, dans les arènes madrilène de Las Ventas, c'est l'espace qu'elles mettent en jeu: les cent mètres qui me séparent du gradin d'en face, et surtout les soixante mètres de diamètre de la piste.
Ici, le toro a le choix de ses échappées et de ses attaques, de ses querencias et de ses voyages. Ici, le torero, doit vraiment s'imposer à la bête pour l'attirer et la retenir. Car, ici, la rencontre attendue ne manque pas de place pour ne pas avoir lieu.
Dans de plus petites arènes, le toro, coincé, attaque comme un chien mord lorsqu'il est acculé au fond d'une impasse. Bien des fois, le toro y fonce par claustrophobie.
Les vastes arènes de Madrid, par contre, lui offrent l'illusion d'une possible fuite. Aussi, l'affrontement n'y est-il pas donné d'avance; il s'y consent, s'y choisit. Les lignes de tension qui fondent la relation entre l'homme et la bête se tracent peu à peu jusqu'à devenir la géométrie invisible, inévitable, du combat.
Alors, ce qui était dispersion devient concentration, ce qui flottait à tous les vents devient intimité, ce qui était hasardeux devient nécessité.
Rien de tel qu'assister à une corrida à Las Ventas pour apprendre la dramaturgie de l'arène. Madrid reste la Mecque de la tauromachie moderne. La source même du regard et la pulsation de la tragédie taurine.
Indispensable de s'y replonger régulièrement. Comme on se rase, une fois l'an, pour retrouver le visage que l'on porte, sous la barbe.
VIVEMENT LA SAN ISIDRO 2012 !!!
RépondreSupprimerMadrid, la matrice de la tauromachie, la mère nourricière, la gardienne du temple, mais surtout l'amante éternelle, celle dont notre corps se détache douloureusement avec l'obession désirante d'y revenir aussitôt, comme une sorte de "mete y saca" prolongé et voluptueux, parenthèse dans la "mise à sac" de la fiesta brava.
RépondreSupprimer